Archives de catégorie : Le temps des fous

La Folie au siècle de la Raison

Au XVIIIème, on proclame la souveraineté du peuple et l’égalité des hommes devant la loi. On veut s’appuyer sur l’expérience, l’observation et l’analyse objective des phénomènes. Partant de la réalité vécue, on décrit ce que l’on voit avec méthode. Et la médecine n’échappe pas à cette obligation de rationalité.

De nombreux indigents encombrent encore le pays, malgré le renforcement de la politique répressive qui les conduit toujours à l’enfermement. Et parmi eux, le fou se fait encore davantage remarquer.

Il devient urgent et indispensable de créer des structures d’accueil supplémentaires pour les insensés.On commence à se révolter contre les mesures d’internement et les mauvais traitements pratiqués à l’asile. Pinel libère les aliénés de leur chaînes pendant que la guillotine fait tomber des têtes.

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L’État propose de renouveler, par l’Édit de 1724, les mesures de renfermement du siècle passé. Et l’Hôpital Général se remplit de plus en plus. Les places s’y font rares et l’on se rend compte que, la plupart du temps, les pauvres capables de travailler n’y apprennent que la paresse.

En 1764, la création de « Dépôts de Mendicité » où on impose une discipline sévère et un travail pénible, accueille les pauvres, réservant l’Hôpital Général aux invalides et aux insensés. Les malades s’y entassent, les plus agités sont enchaînés ou enfermés. Le fou, mal considéré, reste coupable de déraison.

La pensée philosophique s’engage résolument à défendre les droits et les libertés, et à combler ce fossé énorme qui s’est creusé entre la folie et la raison. Cela laisse entendre que chez l’insensé, la raison n’est jamais écartée complètement, qu’il conserve malgré tout une certaine prise sur la réalité. La folie est donc une défaillance du contrôle de soi-même. Les passions sont considérées comme utiles, dans la mesure où elles restent maîtrisées, et elles représentent alors une force de vie qui pousse à agir, à penser, à aimer. Mais abandonnées à elles-mêmes, elles deviennent un obstacle aux connaissances.

Sur le plan médical :

  • La folie est une maladie organique (du bas ventre) : Elle est perçue comme un trouble de la physiologie nerveuse appelé « névrose », « vapeurs », « vésanies » ou encore « maladie des nerfs ».

Classification des maladies mentales :

Boissier de Sauvages, décrit 2000 maladies réparties en dix classes. A la huitième classe, les folies ou « maladies qui troublent la raison », se divisent en quatre ordres :

  • Ordre I : Les « hallucinations » ou « erreurs de l’esprit ».
  • Ordre II : Les « morosités » ou « bizarreries »
  • Ordre III : Les « délires » ou « erreurs de jugement »
  • Ordre IV : Les folies atypiques : amnésie ou insomnie.

Ces ordres sont ensuite eux-mêmes divisés en sous groupes, l’Encyclopédie propose elle aussi sa propre classification :

  • La manie, la mélancolie, la frénésie, l’épilepsie, la démence, l’idiotie et l’imbécillité (Tome VII, p.44)

Le XVIIIème siècle commence à considérer la folie comme une maladie pouvant se ranger avec les autres . On pense que certaines causes lointaines, telles que des affections vives, des chagrins cuisants, l’humidité de l’air, le retour des saisons, l’influence de la lune, les vents, etc…peuvent agiter ou affaiblir l’organisme et causer des vapeurs. Et parfois, ces dérangements se communiquent au cerveau.

Mais, il n’y aucune différence anatomique visible entre un cerveau qui fonctionne normalement et celui d’un fou. L’ignorance, l’incompréhension, le manque de certitudes entraînent un sentiment de crainte, donc une réaction de défense pour se protéger d’un mal que l’on ne connaît pas.

On pratique alors des saignées, des purgations. On inocule la gale ou on provoque des brûlures et des abcès pour extraire le mal, ou on le fait dissoudre avec de l’élixir de vitriol. On immerge le fou dans l’eau, des journées entières, pour le purifier. Mais le traitement le plus couramment utilisé à l’Hôpital est la « peur ». C’est l’antidote de la folie. Elle dompte la fureur maniaque, réduit l’excitation des fibres nerveuses, apaise les craintes irraisonnées des mélancoliques et des hypocondriaques.

Les malades agités, déprimés, délirants ou mélancoliques sont attachés sur une chaise que l’on fait tourner à toute vitesse, jusqu’à ce qu’ils perdent connaissance. Au fur et à mesure, avec le temps, tout philosophes cherchent des explications à travers la connaissance pour avoir une explication valable et d’autre moyens non cruels pour guérir et voir autrement les « fous » .

un article proposé par :

Sonia L. et Myriam B.

La folie dans l’Antiquité

C’est la Grèce classique qui est la première à avoir longuement réfléchi sur la « folie ». La folie à cette époque est le fruit d’une mauvaise action et elle impose une purification.

Oreste poursuivi par les Furies – Bouguereau – 1862.

Oreste est tourmenté par les Érinyes, des divinités persécutrices qui interviennent lorsque quelqu’un tue un membre de sa famille. Poursuivi sans relâche, en proie à des crises de folie passagères, il expiera le crime d’avoir tué sa mère Clytemnestre.

1- Définition des fous :

Le monde gréco-romain a connu des rituels de possession divine qui passaient par des transes déchaînés. Les anciens l’ont assimilé à une folie.

2- Personnification :

Dans la mythologie grecque, Mania, Manea ou Amaury sont des divinités personnifiant la folie. Ces Dieux font l’objet de culte de possession.

3- Les traitements :

Dans l’antiquité, les médecins sont des prêtres-sorciers qui ont recours à des pratiques magico-religieuses pour chasser les démons ou pour invoquer les Dieux guérisseurs. En Mésopotamie et Égypte, les médecins laïcs s’occupent de la maladie physique et les prêtres s’occupent de la maladie mentale par des méthodes incantatoires ou divinatoires; ils parviennent ainsi à chasser les démons ou à calmer les colères et les vengeances divines.

Recherches menées et synthétisées par :

Lauren H.

La folie du Moyen-Age…regard actuel

Introduction  :

Nous allons vous présenter dans cet exposé le regard de la société sur la « folie » du Moyen-âge à la Renaissance. On verra que la folie a été et qu’elle est toujours vue sous différents aspects, que ce soit celui de la maladie « mentale » et/ou « physique », des croyances, des passions, de la différence, ou d’un point de vue philosophique.

Place et symbolique du « fou » :

Entre le Moyen-âge et la Renaissance , le « fol » comme on disait, occupe une vraie place dans la société.

A notre avis, de nos jours, c’est avant tout le mépris qui fait naître la « folie » : nous devenons fou à partir d’un jugement de valeur. Ainsi, dans le film Le Huitième Jour, Harry, pourtant trisomique, est perçu « normalement » par le spectateur, et Georges, qui semble « normal », nous apparaît comme fou, mais ils finissent par devenir inséparables. C’est donc la société qui pose une image sur chacun d’entre nous et sur eux.

Cette histoire est similaire à celle de la Renaissance et du Moyen-Age, car il fallait « paraître », pour ne pas avoir ce genre de jugement sur soi, tout comme aujourd’hui.

Il y avait le Fou (bouffon) du Roi, qui servait à amuser la galerie, à condition de ne pas se moquer des dames de la cour, son rôle était de faire rire le roi.

Certaines personnes étaient appelées « fol(le)s » à cause de leurs croyances ou de leurs pratiques de guérisseurs ; pour les « traiter » on les brûlait, car pour les religieux c’était de la sorcellerie et c’était le mal, cela signifiait le diable. Ils avaient peur, peur de ce que eux n’étaient pas et ne croyaient pas, il fallait donc se débarrasser de ces autres. Certains malades mentaux étaient abandonnés sur de grands bateaux, on appelait ceci « La Nef des fous ».

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Ce tableau a été peint par l’artiste Jérôme Bosch vers les années 1500. Ci-dessus nous voyons un bateau avec des personnes abandonnées, appelés « fou », ils ne sont pas tous forcément habillés, pour ceux qui le sont, ils ont un style particulier (Ex : le bonnet d’âne). Leur expression de visage montre qu’ils sont ailleurs et semblent avoir perdu le bon sens.

Il y a aussi des fêtes associé aux « fous » comme le carnaval, c’était plus généralement les bacheliers qui le fêtaient. Plusieurs soldats étaient mis en place pour éviter trop de dégâts, il faut dire qu’à cette époque chaque individu ou presque portait une arme, et les querelles entre les soldats et la jeunesse ne sont pas rares. On y trouve même des jeux qui font référence aux « fous » comme le jeu d’échec, ou bien les cartes (le tarot).

La folie peut être vue sous des angles différents, mais finalement, nous devenons « fou » au moment où nous dépassons les limites de l’ autre.

L’amour en est un bel exemple, qui peut nous amener vers la haine, en étant jalouse, possessive ce qui nous pousse souvent à commettre l’irréparable ou plutôt à faire des choses « folles » ou « inimaginables ». Quand nous regardons bien l’amour et la haine sont très proches. Ce sont deux sentiments tellement forts, qu’ils dépassent les limites des personnes qui se sont fixé un point.

Les philosophes ne s’y trompaient pas. Pourtant, eux aussi étaient vus comme des fous : la société n’étant pas à la hauteur de leur génie, elle ne comprenait pas forcément leurs dires.

Jusqu’à aujourd’hui, les gens ont peur de la différence ou de l’inconnu, donc leur seul moyen de se sentir mieux et de les rejeter ou de les expulser.

Conclusion :

Nous avons fait cet exposé sur la « folie », qui est un sujet de discussion très vaste car comme nous l’avons vu, ce terme est toujours utilisé sous plusieurs sens. Les « traitements » que les gens « normaux » faisaient à cette époque de cette « pathologie » n’était pas toujours une bonne chose, car faire ceci, c’est rendre la société encore plus folle qu’elle est déjà.

une réflexion menée par :

Monelle D. et Déborah B.

La Folie au siècle classique

A la fin du XVIème début du XVIIème siècle l’Édit de Nantes est proclamé. On est libre de pratiquer sa religion. C’est à partir de ce siècle que la « folie » n’est plus jugée par l’ Église.

Au XVIIème siècle, la folie commence à être considérée comme une maladie n’étant pas due au péché, mais comme un trouble pouvant s’expliquer par des observations et un raisonnement déductif . Ce n’est pas pour autant que tout le monde arrête de pourchasser les sorcières et les phénomènes étranges, on dirait même que le phénomène aurait tendance à s’amplifier.

C’est le pouvoir laïc qui prend le rôle des Inquisiteurs Ecclésiastiques. Ce sont les tribunaux civils qui jugent les cas de possessions.

La lutte contre la pauvreté va amener la création de l’Hôpital Général. Le malade mental va y être enfermé et aura par la suite ses propres quartiers d’isolement.

Dès lors, on ne cherche plus seulement à lutter contre la pauvreté, on décide de prendre des mesures efficaces pour assainir complètement le pays, en enfermant tous les indésirables, tous ceux et celles qui représentent un poids mort économique ou un danger social : étrangers, mendiants, vagabonds, larrons, criminels, vénériens, pestiférés, insensés, etc… C’est la politique d’assainissement, de 1656 à 1667.

Et c’est ainsi que l’on commence à distinguer deux sortes de pauvreté :

  • La « bonne », qui accepte la réclusion et la soumission au travail comme des bienfaits, et qui se repent sagement de son délit de pauvreté.
  • La « mauvaise », qui se refuse obstinément à obéir ou à travailler, et qui, de ce fait, n’en mérite que davantage la punition et les châtiments.

Parmi tous ces correctionnaires, se trouvent mêlés d’authentiques malades mentaux, qui, pris au piège de la lutte contre la pauvreté, doivent par obligation se ranger aux côtés de l’illégalité et de l’incapacité au travail.

Pauvres et pauvres d’esprit sont confondus. La folie appartient au monde de la mauvaise pauvreté, elle est aussi considérée comme un délit : l’oisiveté, la paresse, le brigandage, la prostitution, l’homosexualité, le crime, les maladies vénériennes et la folie s’apparentent. Les fautes de la raison s’associent aux fautes de la chair ou aux fautes de droit, et trahissent une déviance sociale, un désordre méritant une nécessaire condamnation.

L’État, impose de corriger celui qui s’est égaré, de le ramener à la raison par la pénitence et la reconnaissance de la faute.

Les « honnêtes gens » sont satisfaits, quant à eux, de constater que l’on se décide enfin à mettre de l’ordre dans ce monde de la misère responsable de l’insécurité, de la crise économique et du chômage…

Les malades mentaux y sont condamnés à mener une existence de prisonniers et à partager avec les autres correctionnaires la peur, les punitions et les privations de toutes sortes. Ce n’est pas dans l’intention de leur prodiguer des soins ou de leur assurer un bien-être, mais simplement pour résoudre un problème de cohabitation.

On s’oriente, peu à peu, vers une meilleure compréhension de la folie, la considérant presque comme une maladie, une pathologie propre à la réalité humaine. Mais paradoxalement, le fou se retrouve, à la fin du siècle, enfermé et traité comme un prisonnier.

Aujourd’hui encore, nos institutions psychiatriques ont beaucoup de mal pour parvenir à concilier le soin et la privation de liberté.

Article proposé par :

Myriam B. et Sonia L.

Le siècle des aliénistes

Philippe Pinel inaugure, après la Révolution, le mouvement aliéniste.
Philippe Pinel inaugure, après la Révolution, le mouvement aliéniste.

Définition :

  • nom : Un aliéniste est un médecin spécialisé dans la pathologie mentale. Ce terme apparait vers 1846 puis est définitivement remplacé depuis 1938 par celui de Psychiatre).
  • origine : il est formé sur « aliéné » qui désigne le fou, car celui-ci est autre, étranger (alienus en latin) à lui-même.

La loi :

Note : Ce passage consacré au cadre juridique contient de nombreux extraits de Histoire de la folie – De l’ Antiquité à nos jours de Claude Quétel, 2010. Que l’ auteur en soit remercié.

La loi fondatrice est votée le 14 juin 1838 par la Chambre de Député (avec 2166 voix contre 16)

Le 30 juin 1838, une loi sur les aliénés et promulguée son article 1er annonce « chaque département est tenu d’avoir un établissement public, spécialement destiné à recevoir et soigner les aliénés, ou de traiter, à cet effet, avec un établissement public et privé, soit de ce département, soit d’un autre département » (Al. 1er)

L’ordonnance du 18 décembre 1839 permet à la loi d’entrer en vigueur, en tout cas pour ce qui concerne le statut et le fonctionnement des établissements. « Le traitement de l’aliénation mentale comporte des soins tout particuliers, un régime aussi bien moral que physique, qui exige impérieusement que le médecin puisse ordonner, avec une certaine indépendance toutes les dispositions qu’il juge propres à rendre le malade à la raison. » A cette date toutefois, l’administration centrale connaît mal encore la situation exacte de chaque département. De leur côté, les départements doivent se faire préciser chaque point de la loi, à commencer, et comme toujours, par les questions financières.

Une intense réglementation s’ensuit au cours des années 1840, 1841, 1842, cet énorme réglementation, avec ses 189 articles, ses 15 modèles de tableau et ses explications, article par article, ne laisse rien au hasard et va constituer la bible des asiles d’aliénés : administration, service médical (7 articles, par ex, sur les seules attributions du pharmacien)… Le ministre en fait explicitement le complément de la loi de 1838 : « Consacrée par 18 années d’expérience, cette œuvre est de celles dont l’Administration française peut à bon droit s’honorer et les législations étrangères y ont fait de nombreux emprunts. »

Son article 5 énonce dans la même idée : « les établissements privés consacrés au traitement d’autres maladies ne pourront recevoir les personnes atteintes d’aliénation mentale, à moins qu’elles ne soient placées dans un local entièrement séparé » (Al. 2)

L’article 7 de la loi du 30 juin 1838 prévoyait que les règlements intérieures des établissements d’aliénés devraient être soumis à l’approbation du ministre.

Ainsi s’explique la rédaction d’un modèle publié par arrêté du 20 mars 1857. On peut également y lire que les chefs de ces établissements d’aliénés, dis « asiles », ne peuvent recevoir une personne atteinte d’aliénation mentale que s’il leur est remis une demande d’admission, un certificat de médecin constatant l’état de la personne à placer, et indiquant les particularités de sa maladie et la nécessité de faire traiter la personne désignée dans un établissement d’aliénés, et de l’y tenir renfermée (Art. 8)

On peut d’ors et déjà noter que l’article 13 évoquait un certain « rétablissement » du malade mental puisqu’il énonçait « toute personne placée dans un établissement d’aliénés cessera d’y être retenue aussitôt que les médecins de l’établissement auront déclaré, sur le registre énoncé en article précédent, que la guérison est obtenue. »

Une leçon du Professeur Charcot à La Salpêtrière, par A. Bouillet ; 1887.
Une leçon du Professeur Charcot à La Salpêtrière, par A. Bouillet ; 1887.

Dès la fin du 19ème siècle la psychiatrie prend donc une autre dimension, nombre de théories pour décrire la maladie mentale sont formulées, sur la paranoïa, la démence, la dégénérescence, la névrose, l’hystérie… Dès 1860, on met en place la clinique de la schizophrénie. En effet, c’est l’époque du développement de la psychanalyse. La psychiatrie devient une spécialité médicale et des moyens lui sont données, permettant d’envisager les pathologies auxquelles elle se rapporte sous l’angle de la thérapie, les initiateurs de ce mouvement sont Jean-Martin Charcot et Sigmund Freud. Le premier adepte de l’hypnose pour soigner les crises de démence. Le second s’appuiera sur les travaux du premier pour ses propres travaux sur l’hystérie et le concept de psychogénèse.

Sigmund Freud, le "père" de la psychanalyse, photographié en 1922 pour le magasine LIFE.
Sigmund Freud, le « père » de la psychanalyse, photographié en 1922 pour le magasine LIFE.

Rappelons pour finir que Sigmund Freud donner une place très importante à l’inconscient ainsi qu’ « aux événements traumatiques appartenant à l’histoire précoce du patient. »

Extrait de « L’histoire de la folie » de Claude Quetel .

Lecture et composition de :

Candice G.